Les lieux chauds
Avant et après l'historique rencontre Dizzy Gillespie - Chano Pozo, Cuba et les Etats-Unis n'ont cessé d'entrecroiser leurs musiques. Et La Havane aujourd'hui encore reste un paradis pour l'amateur de jazz.
Une histoire détaillée du jazz à Cuba reste à écrire. Cette île a produit des jazzmen dont la réputation n'est plus à faire - certains ont définitivement influencé la musique populaire du vingtième siècle : Armando Peraza, Armando Romeu, Frank Emilio Flynn, Bebo Valdès et son fils Chucho, Mario Bauza, Machito, Chano Pozo, Tata Guines, Chico O'Farrill, Gustavo Mas, Orestes et Cachao Lopez, Cachaito, Arturo Sandoval, Paquito D'Rivera, Emiliano Salvador... Luc Delannoy.
Inauguré en février 1999, cet élégant espace se trouve au troisième étage d'un centre commercial (Paseo y Primera, Vedado. C'est le quartier général des fondateurs d'Irakere, Chucho Valdès et le batteur Enrique Pla. Musique tous les soirs dès 23 heures. Les musiciens jouent deux sets d'une heure. Jam session occasionnelle. Hélas, même si le prix d'entrée inclut une consommation, ces 30 francs à l"époque en font un lieu inaccessible pour la majorité des Cubains. Très bonne carte, avec sandwiches "Chucho", "Piñajazz", "Hamburger Jazz Fusion", réservée aux touristes et Cubains fortunés. Responsable de la programmation, Orestes Garcia est décidé à proposer des musiciens américains et européens.... Luc Delannoy.
Situé en sous-sol - on y accède en entrant dans une cabine téléphonique de style londonien ! - " la Zorra y el Cuervo " propose de la musique tous les soirs à partir de 22 heures (Calle 23 - 155, entre N et O, Vedado. Trois et cinq dollars l'entrée). Longtemps seul club de la ville, il a vu défiler la plupart des musiciens locaux ainsi que les musiciens étrangers de passage. Gonzalo Rubalcaba y fit ses débuts et c'est là qu'ont lieu toutes les jam sessions d'après-concert. Le dimanche après-midi est réservé aux musiciens âgés de 15 à 20 ans. Depuis mars 99, ce club prête ses locaux à l'association " Club Cubano de Jazz " qui organise un concert mensuel.
Imaginez un piano-bar cossu où Frank Emilio Flynn joue en solo les samedi et dimanche à partir de 22 h 30 (Calzada y Calle C, Vedado). "La Esquina del Jazz" C'est le nom d'un club d'amateurs de jazz que j'ai fondé dans les années 40 avec quelques copains ", explique Gilberto Torres, un rouleur de cigares de 74 ans. " Nous faisions des réunions hebdomadaires dans la maison des uns et des autres, et depuis vingt-quatre ans tout se passe chez moi. A la fin des années 40, il y avait deux bandes, les amateurs du mouvement feeling qui se faisaient appeller " Les Diables du Swing ", et nous, les jazzmen, " Les Cuban Stars Swing " !
Chez moi, tout le monde est venu, Dizzy, Arturo Sandoval…, et en 48 Milt Jackson pour que je lui apprenne à jouer de la cascara, cette percussion métallique que l'on met autour des caisses des tambours, Max Roach aussi est venu, et Roy Hargrove - c'est ici qu'ont été prises les photos qui figurent sur le cd qui lui a valu un Grammy.
Aujourd'hui les amateurs se réunissent le premier samedi de chaque mois dans les locaux de l'Union de Journalistes (Calle 23 et I, Vedado) et le deuxième samedi du mois chez moi. Quand il n'y a pas de jam, on écoute les disques envoyés par un de mes fils qui vit à Miami. La meilleure façon pour venir jusqu'ici c'est de demander à des musiciens, j'habite à Santa Amalia, tout le monde connaît La Esquina del Jazz. "
Jazz Plaza & Jo Jazz Organisé par l'Instituto Cubano de la Musica, Jazz Plaza de La Havane a débuté comme festival local en 1979. Rebaptisé Festival Jazz Latino Plaza, il prend une dimension internationale et accueille les grands noms du business : Dizzy, Tania Maria, Richie Cole, Andy Gonzalez, Roy Hargrove, Max Roach, Steve Turre, Ramsey Lewis, Wynton Marsalis. Les participants sont invités par les musiciens cubains et ne perçoivent aucun cachet. Le prix des entrées oscille entre 3 et 5 pesos cubains (20 pesos = 1 dollar). Le festival a lieu en décembre et dure cinq jours - trois ou quatre concerts par jour. Les concerts alternent avec tables rondes et conférences
La révélation de la dernière édition du festival - auquel il participe depuis 94 - est un trompettiste de 18 ans, Yasek Manzano Silva. Wynton Marsalis a fait le voyage pour le rencontrer et en 97 Roy Hargrove lui a offert une trompette. Ils ont joué ensemble en 98 et participé aux jam sessions dans les clubs de la ville. Yasek, qui revendique l'influence de Clifford Brown, Roy Eldridge et Bobby Carcasès, enregistre actuellement avec le groupe "Diagara" d'Oscar Valdès.
En marge du festival, a été organisé le premier concours de jeunes musiciens cubains : "Jo Jazz ".24 instrumentistes s'étaient inscrits dont près de la moitié venant de l'intérieur du pays. Un exploit si l'on sait les difficultés que connaissent les Cubains pour voyager dans leur propre pays ! Le vainqueur, le guitariste Norberto Rodriguez, est originaire de Villa Clara, petite ville du centre de l'ile située à 350 kilomètres de la capitale. Le prix : un enregistrement dans les studios Egrem.
Pour les amateurs, La Havane est le paradis des vinyles. On trouve des LPs avec pochette originale en bon état pour 2 à 3 dollars. Il faut certes éviter les marchés publics où se rassemblent les touristes qui peuvent payer jusqu'à 20 dollars… Les meilleures occasions se trouvent sur les trottoirs du quartier de Centro Habana où des particuliers étalent leur collection. On trouve de tout : classique, jazz, musique cubaine - jusqu'à Dalida en pressage soviétique ! La Havane, c'est aussi le paradis des cassettes. Les cd sont vendus 15 dollars minimum. S'ils sont produits et enregistrés dans l'île, c'est-à-dire si les studios Egrem possèdent le master, ceux-ci mettent sur le marché une version cassette à 20 pesos (6 F), pour permettre aux Cubains de se les procurer. Les cassettes se vendent dans la rue.
Luc Delannoy est l'auteur de Caliente ! (Editions Denoël).
Les lieux chauds
Dans les Trovadores : il faut distinguer Pepe Sanchez, Alberto Villalon poète à l'inspiration tourmentée qui laissa à la postérité "Boda Negra", Miguel Matamoros, Pepe Bandera, Emiliano Blez et Salvador Adams.
Los Fakires est un groupe cubain qui a eu déjà plusieurs succès dans les Canaries, sans aucune promotion et comme seul distributeur un petit label indépendant, leur premier album Suavecito...
